Suite aux sécheresses estivales de ces dernières années, le paillage est devenu incontournable pour les massifs d’annuelles ou de vivaces. Au fur et à mesure des années des paillages aux origines différentes sont apparus dans le commerce et dans les jardineries : lequel choisir et pour quels utilisations/bénéfices ou inconvénients ? Lorsque l’été s’annonce pluvieux, la question se pose : faut-il pailler tout de même les massifs ? Voyons comment font les pros…
Les différents paillages pour massifs floraux
Popularisé par des émissions de jardinage grand-public certains paillages ont connu un grand succès avec notamment la paillette de lin largement « subventionnée » pendant un temps dans l’émission « Silence ça pousse » sur France 5. Ayant des références plus professionnelles j’ai pu observer dans les grandes villes l’évolution des types de paillage dans le fleurissement au cours du temps.
Jadis il y eut la tourbe
Il y a une grosse dizaine d’année, les jardiniers municipaux paillaient leurs massifs avec de la tourbe blonde : ce n’était pas cher et on croyait la ressource loin d’être épuisée, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Or la tourbe se fait rare et chère, surtout certaines années très humides où son extraction est plus difficile dans ces conditions.
Puis la paillette de lin est arrivée
La paillette de lin remplaça ensuite la tourbe avec de nombreux avantages.
Son caractère « autobloquant » faisant de ce paillis léger au premier abord une couverture résistante au vent.
Son pH neutre est également un atout par rapport à la tourbe qui, légèrement acide, pouvait indisposer certaines plantes annuelles. On lui prête également des vertus anti-limaces, secondaire en pleine ville (milieu urbain et minéral), mais qui pouvait avoir son intérêt dans les parcs arborés. La paillette de lin est issue du teillage du lin qui consiste à séparer les graines des fibres de bois de la plante.
Malheureusement j’ai remarqué la baisse de qualité des paillettes vendues sous certaines marques. Un teillage mal réalisé laisse des graines de lin parmi les paillettes avec pour conséquence un développement important de plants de lin dans les massifs ainsi paillés obligeant à un travail de désherbage supplémentaire.
La paillette de chanvre
Plus récent, le paillis de chanvre a connu son heure de gloire. Tout comme la paillette de lin il est « autobloquant » car résistant au vent et de pH neutre. La partie de la plante utilisée est la chènevotte qui correspond à la partie centrale de la plante qui véhicule la sève très hydrophile. Ce caractère rend le paillis de chanvre très efficace voire trop si l’été est humide provoquant des problèmes d’excès d’humidité au niveau des racines (capacité de rétention en eau de 370g d’eau pour 100g de chènevotte) Dans ces conditions les massifs perdent en qualité visuelle. Comme la paillette de lin des vertus anti-limaces lui sont également attribuées.
La culture du chanvre agricole revient peu à peu en France après l’époque faste de cette culture au XIXe siècle ou elle occupait quelque 176 00 ha. Aujourd’hui on compte 8000 ha de chanvre cultivé essentiellement dans le nord de la France.
Chanvre et lin : les points communs
Ces deux matières ont en commun leur couleur très « paille » et lumineuse par rapport à un sol non paillé plutôt sombre. L’effet de tissage et de lumière que ces fibres provoquaient a été une grande mode pendant un temps mais les villes les plus en pointe cherchent des solutions pour revenir à des paillages plus naturels du point de vue de la teinte qui devrait se rapprocher de la couleur de la terre. Tout cela n’enlève rien aux qualités intrinsèques de ces paillis, ce ne sont que des partis-pris esthétiques. Une note cependant aux soit-disant propriétés anti-limaces que l’on prête à ces paillages : pour les avoir testé je dois avouer que je suis très sceptique quant à celles-ci, les limaces les plus affamées n’ayant nullement été freinées dans leur festin.
Les cosses de sarrasin : le dernier venu
De nombreuses villes adoptent désormais les cosses de sarrasin issues de la culture du blé noir (enveloppe de la graine). La couleur sombre des cosses de sarrasin met particulièrement en valeur les plantes fleuries des massifs grâce à des effets de contraste particulièrement important. Cette même couleur sombre à la particularité de capter la chaleur constituant un atout supplémentaire lors des étés un peu frais que connaissent certaines régions depuis quelques années. Là encore les commerciaux vantent des propriétés anti-limace.
Conclusion sur le choix du paillage
Jardinier amateur comme professionnel doivent choisir leur paillage pour massif fleuri en fonction de critères esthétiques, techniques mais aussi financiers. La paillette de lin est la moins chère (on la trouve en gros conditionnement sur forme de balles compressées), suivit de la paillette de chanvre et de la cosse de sarrasin qui est la plus onéreuse. A noter que tous ces paillages sont des déchets valorisés, renouvelables et produits localement en France contrairement à d’autres paillages que je n’ai pas évoqué dans cet article comme les coques de cacao (qui viennent de très loin).
Faut-il pailler en été ?
La question se pose de plus en plus pour des jardiniers amateurs qui ne voient pas l’intérêt d’investir dans du paillage destiné à économiser de l’eau qui n’arrête pas de tomber. Réponse: il faut pailler. Tous les professionnels sensés le font, mais avec intelligence. Il faut choisir le bon paillage en fonction des plantes : par exemple les plantes sensibles à l’excès d’humidité n’aiment pas le chanvre.
De plus le paillage n’a pas qu’une fonction « économisatrice » d’eau. Il permet de protéger le sol du tassement superficiel du sol provoqué par la chute des gouttes d’eau qui forme ce que les professionnels appellent la croûte de battance.
Pour finir le paillage associé à une densité de plantation correcte des végétaux limite considérablement la pousse des mauvaises herbes.
Dernière modification le 26 juin 2021 par Sébastien